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Dis Daddy, dada ? Rencontre de papas cavaliers professionnels

Quels sont les secrets de ces cavaliers, qui mènent de front une brillante carrière équestre et une vie de famille épanouie ? A l'occasion de la fête des pères, Tacante a approché deux figures du monde équestre…
Dis Daddy, dada ? Rencontre de papas cavaliers professionnels

Le 21 juin c’est la fête des pères, l’occasion pour Tacante de s’interroger sur la façon dont les cavaliers professionnels arrivent à concilier vie de famille et carrière équestre. Beaucoup d’entre eux, qu’ils soient cavaliers de concours, jockeys, cavaliers de spectacle ou encore enseignants, passent de longues heures sur la route en camion, et les week-ends sont généralement studieux, consacrés aux cours, concours, courses et spectacles… Dans ces conditions, construire une vie de famille et élever des enfants relève du travail d’équilibriste… Exercice périlleux, certes ! Et pourtant… Il est frappant de constater combien le métier de cavalier se vit souvent en famille. Citons quelques exemples de cavaliers internationaux : Eric Navet est le fils d’Alain, cavalier international et éleveur sous l’affixe “de Baussy”. La complicité paternelle entre Rodrigo et Nelson Pessoa est décrite dans le livre Tu seras cavalier, mon fils : la saga Pessoa. Timothée Anciaume doit ses premières leçons de mise en selle à son père Patrick, propriétaire d’un centre équestre près de Rouen. Dans le monde des courses, c’est encore plus flagrant : le métier se transmet le plus souvent de père en fils. C’est le cas pour Christophe Soumillon, l’un des meilleurs jockeys du monde, et qui avoue volontiers n’avoir fait ce métier que pour tirer de la bouche de son jockey de père quelques compliments…

Devant tous ces exemples, force est de constater que les cavaliers professionnels conjuguent avec succès leur carrière et leur vie de famille, puisque, loin d’en être dégoûtés, bien des enfants embrassent à leur tour cette carrière exigeante !

Quels sont les secrets de ces cavaliers, qui mènent de front une brillante carrière équestre et une vie de famille épanouie ? Tacante a approché deux figures du monde équestre, qui ont accepté de livrer quelques petits secrets de réussite…

Interview croisée de Christophe Mayer, responsable du Centre équestre de la Forge, à Vichy, instructeur diplômé d’état et père de 3 enfants (Alexia, Camille et Kévin), et de Karim Laghouag, cavalier international de Concours Complet et de CSO, ambassadeur d’Horsealot et père d’un petit Quentin.

Karim Laghouag ©Pauline Chevalier – Christophe Mayer ©Fanny Germain

 Tacante : comment conciliez -vous votre vie personnelle et professionnelle ?  (temps consacré quotidiennement à la famille, organisation quand vous êtes en déplacement…) ?

Christophe Mayer : ce n’est pas toujours facile de concilier les deux car ma vie professionnelle est très prenante, les horaires sont élastiques. Il faut concilier les activités d’enseignements et le travail des chevaux et être disponible pour tout le monde. D’autre part, ce métier n’est pas très rémunérateur et nécessite une présence importante et une disponibilité constante – chose dont les clients n’ont pas forcément conscience – pour gagner sa vie correctement. Il est donc difficile de concilier vie personnelle et vie professionnelle, les deux étant intrinsèquement liées, d’autant plus si on habite sur son lieu de travail. Néanmoins, on essaye de conserver des moments pour la vie de famille.

Karim Laghouag : on vit dans notre travail tous ensemble et notre vie professionnelle est étroitement liée à notre vie personnelle. Notre maison est sur place aux écuries ce qui facilite notre quotidien car cela nous permet d’être ensemble plus souvent au final ! En déplacement, nous avons un camion avec home-car aménagé pouvant accueillir toute la famille. Pour l’instant mon fils ne va pas a l’école donc il vient avec nous sur la plupart des concours. Quand on part à l’étranger pendant une semaine entière, il va chez sa grand mère.

Tacante : qu’est-ce que cela vous apporte dans votre carrière d’être père de famille ?

Christophe Mayer : mon statut me permet de cerner les attentes des plus jeunes cavaliers grâce à mes expériences par rapport à mes enfants, et de mieux adapter ma pédagogie en fonction de l’âge des cavaliers.

Karim Laghouag : ça m’apporte la même chose que si je ne pratiquais pas mon sport. C’est la même joie pour tous les parents je pense ! Nous n’avons pas ressenti un réel chamboulement depuis son arrivée. Je ne pratique pas mon sport avec plus d’appréhension depuis que je suis père, et je n’ai pas levé le pied pour autant. J’ai simplement plus envie de construire quelque chose qui va perdurer et qui va assurer mes vieux jours, pour lui, pour ma famille. Nous avons acheté notre installation et j’essaie d’orienter ma vie professionnelle un peu différemment afin de me libérer du temps pour autre chose que la compétition.

Tacante : quels sont les sacrifices qu’a occasionné votre profession ?

Christophe Mayer : il n’est pas facile d’être père de famille, car si on est présent pour la bonne marche de son activité, on l’est forcément moins pour sa famille. Si les enfants sont également cavaliers et passionnés par l’équitation, la relation est différente, car il est plus facile de partager du temps en commun. Sinon, ils peuvent ressentir une certaine frustration du fait des absences occasionnées par les activités professionnelles. De plus, en tant que directeur d’une structure équestre, je dois choisir entre le bon fonctionnement de l’entreprise et mes activités de cavalier. Par exemple, je me refuse des sorties en compétition si elles s’avèrent trop onéreuses ou empiètent sur la rentabilité du club. Les loisirs annexes sont relativement peu nombreux, surtout en début de carrière ou lors d’investissements. Il en est de même pour la « vie sociale ».

Karim Laghouag : dans l’absolu, je n’ai pas la possibilité de faire autre chose, car mon métier me demande une présence quotidienne donc cela n’est pas facile de découvrir d’autres horizons. Je prends peu de vacances et peu de week-ends en dehors de la sphère “cheval”. Mais les concours, c’est pour l’instant un peu comme des vacances pour mon fils. Les autres cavaliers ont des enfants, qui sont autant de copains pour lui ! Quand il rentrera à l’école, ce sera un autre problème et le jour où il me dira qu’il en a marre d’aller en concours, alors là j’aurai peut être l’impression de faire beaucoup de sacrifices…

Tacante : que pensent vos enfants de votre profession ? Montrent-ils l’envie de faire le même métier que leur père ?

Christophe Mayer : cette profession dépend plus d’une vocation que d’une envie. Il est nécessaire pour la personne concernée de ne pas compter ses heures, de savoir gérer une entreprise mais aussi faire « du social ». Ainsi, il est parfois difficile de prendre du temps pour moi et cela s’en ressent sur la vie de famille : peu de temps ensemble, peu de sorties et de vacances, peu de temps de dialogue. De plus, la fatigue et les différents rythmes de vies entraînent des incompréhensions parfois difficiles à gérer : la réalité est différente et se mettre à la place de l’autre compliqué. L’une de mes trois enfants montre l’envie de suivre la même voie et passe actuellement son Bpjeps après avoir fait une licence de biotechnologie.

Karim Laghouag : il est trop petit pour que je puisse lui demander son avis ! Soit il aura la passion de son père, soit il prendra un petit peu en grippe cette passion et ne souhaitera plus me suivre sur les concours.

Tacante : votre père a-t-il eu une influence sur votre choix de carrière ?

Christophe Mayer : mon père n’a pas eu d’influence sur mon choix de carrière puisqu’il n’était pas cavalier. Cependant, j’ai influencé indirectement ma fille aînée qui désire être professionnelle de l’équitation.

Karim Laghouag : mon père n’a pas eu d’influence du tout, c’était un artiste. Mais mon oncle oui, il a d’ailleurs un peu joué le rôle de père pour moi. J’ai été chez lui à 12 ans et c’est chez lui que m’est venue cette passion. J’ai fait toutes mes armes chez lui. C’est son métier, il a toujours eu une grosse écurie avec club et compétition. S’il n avait pas été là, je n’aurais sans doute pas fait ce métier.

Tacante : quels seraient vos conseils à des jeunes cavaliers pour préserver leur vie de famille malgré leur carrière très prenante ? 
Christophe Mayer : je pense qu’il n’y a pas beaucoup de conseils à donner car chaque cas est différent. À eux de faire les choix qui paraissent être les bons et ne pas se décourager. C’est plus facile lorsque la personne avec qui on vit partage cette-même passion. S’ils ont des parents fortunés, ce sera néanmoins plus facile…

Karim Laghouag : d’avoir la même passion que sa femme, ses enfants, c’est ce qui fonctionne. Que le cheval soit au moins toléré par sa compagne, sinon l’organisation devient très compliquée voire impossible. C’est important aussi de prendre le temps de s’occuper de sa famille car sinon on tombe vite dans cheval cheval et cheval ! Quand je suis à la maison, je me coupe complètement du monde professionnel et je profite de ma famille, surtout qu’elle va s’agrandir !

Un grand merci à Christophe et Karim, et bonne fête à tous les papas !

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